Facettes

Elle léchait avidement la lame constellée de tâches carmines, avalant peu à peu l'impérial bordeau qui coulait sur ses mains. Le Soleil se couchait déja à l'horizon, empourprant la plaine vallonée de cadavres sanguinolents.
Les humains étaient faibles, fragiles et peureux, mais leur Foi était immense. Et le Trône des Crânes demandait des Crânes. Le Dieu du Sang avait eu Son Dû, mais Son Trône en demandait encore. Elle se releva lentement, déployant ses grandes ailes d'un rouge pur, et commença à marcher vers la forêt. Ses sabots brisaient les os sur lesquels elle marchait, tandis qu'elle s'amusait à ouvrir une tête arrachée avec le bout de ses ongles pointus.
Le brouillard commençait à se lever sur les décombres fumantes du champ de bataille, et l'odeur de mort était fraiche. Mais déja les Démons avaient fui les lieux, laissant la place aux corbeaux affamés.
La chasse avait été bonne, mais il fallait changer de champ de bataille. Ils étaient peu à pe en train de disparaitre, comme à chaque fois. On aurait pu les croire mercenaires, mais ils ne suivaient que leur propre voie, la voie du carnage et de la désolation. Un peu comme celle des humains, après tout. Et puis c'étaient eux qui les invoquaient dans leur monde, les Démons ne faisaient que répondre à un appel.
Dommage que les humains n'aient pas encore compris que les démons n'obéissaient qu'aux Dieux... Dommage pour eux.
Car quel plaisir à chaque fois renouvelé, que de lacérer les chairs, déchirer les os, laper le sang frais et vivifiant, absorber leur Foi malsaine, et voir sur leur visages la Peur. La vraie Peur. Celle qui vous fait ouvrir de grands yeux, qui fait monter une flèche de Foi énorme jusqu'au ciel, celle qui rendait le sang si délicieusement acide, et leur chair si goutûes...
Oh que c'était bon de sentir leur Haine quand ils attaquaient avec l'énergie du désespoir...
Cette Haine pure et simple, cette envie de détruire, cette Peur sous-jacente... Voir leur face étonnée lorsque leur flèches traversaient la chair sans s'arréter, et qu'elle se remmettait à marcher le sourire aux lèvres.
Leur éffarement lorsque leurs Lames étaient arrétées en plein cercle mortel...
Oh si seulement il n'y avait pas leur croyance idiotes en un Ciel qui soit bon... Mais pourquoi allaient ils se mettre dans la tête que quelquechose pouvait les sauver ? C'était pourtant cette croyance idiote qui faisait si mal... Cet argent qu'ils mettaient sur leur pointes de flèches, ces prières saugrenues et discordantes...
Ils ne connaissaient rien à la mélodie de souffrances, aux complaintes de douleurs, aux symphoniques du mal... Quelle peine...